Barra de Salvador le 29 janvier 2007

 

Le week-end a été bien occupé, malgré la crève que nous avons attrapée, par overdose d’air conditionné. Dominique a commencé, rhinite, conjonctivite, bronchite. Il était bien touché, puisque ça l’a même dégoutté de son bain de mer journalier ! Moi je me suis pensée plus forte ! Quand il a commencé à se trouver mieux, j’ai commencé à me trouver mal ! Je suis encore dedans. Pourtant l’air conditionné est coupé depuis plusieurs jours et on mijote dans la sueur, puisqu’il n’y a même pas de ventilateur pour le remplacer !

 

Samedi soir nous voilà plongés dans la civilisation et la tradition indienne du Brésil.

L’IDETI, Institut des Traditions Indigènes, parcourt le Brésil et le monde entier (ils se sont présentés en France lors de l’année brésilienne) pour faire connaître les rites, les chants, les danses qui font partie du quotidien de la population indienne du Brésil. Constitués de plus de 220 ethnies réparties en milliers de « villages » dans tout le territoire brésilien, ils représentent une grande richesse par leur diversité linguistique, culturelle, artistique. Il reste encore au 21ème siècle au Brésil des tribus isolées et sans contact avec la civilisation occidentale. « Personne ne respecte ce qu’il ignore et nous avons besoin de montrer qui nous sommes et la force de notre culture. C’est seulement ainsi qu’on respectera et admirera ce que nous sommes » a dit le chef Wabua Xavante.

Le programme s’intitule « rite de passage » et a pour mission, spécialement à Salvador, de rapprocher les traditions en réunissant les habitants de cette ville à fort héritage africain et les peuples indigènes et célébrer la diversité des racines !

Ce n’est ni un show, ni un spectacle qui nous est présenté, mais un vrai rituel transporté de la place de cérémonie du village indien à l’espace scénique du Solar do Unhão où nous sommes. Cadre impressionnant de nuit, au bord de la Bahia, où de l’autre côté se reflétent les lumières de Itaparica. Bruit des vagues sur le rivage, se mêlant aux sons profonds des chants venus de temps immémoriaux. Avant de débuter, il est demandé à chacun de ne pas photographier et de débrancher son téléphone mobile. Je n’ai donc aucune photo pour témoigner !

La tribu de Xavantes nous présente leurs chants et danses rituels. Autour d’un feu très odorant, ils nous transportent dans leur autre monde pendant une bonne heure. Cette tribu a rencontré la civilisation occidentale il y a seulement 60 ans. Ce qui explique qu’ils soient encore quelques 13 000 répartis en 8 réserves dans l’état du Mato Grosso.

C’est une célébration sans fioriture. Aucun accompagnement sonore à part les sons profonds et puissants qu’ils émettent, venant de très loin dans le temps, le rythme donné par les nombreux colliers et bracelets qu’ils portent au cou, aux bras, aux chevilles et qui leur servent de maracà. Leurs silences aussi sont puissants, pendant qu’ils se couvrent les uns les autres de peinture. Chaque corps peint est une oeuvre d’art. On n’a pas les explications, mais je suppose que la personnalité de celui qui peint ou de celui qui reçoit la peinture a son importance dans le choix des motifs, qui des étoiles, qui des points, qui des quadrillés, qui des losanges, peintures noires et rouges de jenipapo, charbon, urucum.

Pendant qu’ils dansent autour du feu, se tenant tous par la main, je pense aux danses bretonnes et je me dis que dans toutes les traditions on trouve une inspiration commune !

Je ne me suis pas trompée, car à la fin de leur présentation, ils invitent l’assistance à les rejoindre sur l’aire de terre battue, autour du feu et tous se retrouvent à essayer de suivre leurs pas en se trémoussant ! C’est la vraie communion ! Digne d’un festnoz !

 

Dimanche, levés de bonne heure, à la fraîcheur, nous allons prendre le bus à la rodoviaria (gare routière) pour Santo Amaro, ville natale de mes idoles de toujours, Maria Bethania et son frère Caetano Veloso. C’est un pèlerinage ! Santo Amaro se situe à une heure et quelques de Salvador dans la région fertile de la Bahia appelée Recôncavo. Tout au long de la route, paysage très verdoyant, forêts de bambous, bananiers, palmiers, pâturages. Nous arrivons à Santo Amaro qui de coutume doit être une petite ville très tranquille, mais très animée et peuplée ces jours-ci par la célébration « da lavagem de Nossa Senhora da Purificaçao », patronne de la ville ! C’est une fête renommée où des cortèges de Baianas accompagnées de la foule, de la musique des bandas et des trios eletricos, se rendent à l’église pour laver le sol et les marches ! Nous arrivons après les processions, mais la fête bat encore son plein ! Dans chaque visage croisé, je pense à nos idoles cherchant un air de famille !

Sur la place de l’église une scène est dressée. Daniela Mercury, en chair et en os, est en train de chanter, remuant la foule qui dit-elle, a du mal à se réveiller des excès de la veille ! Nous nous battons quasiment corps à corps avec la foule pour pouvoir avancer. Soudain, je la vois ! Une camarote (tribune) est réservée aux personnalités et Bethania est là, magnifique. Toute habillée de blanc, un diadème de perles sur le front, qui retombe autour du visage, une vraie déesse égyptienne ! Autour d’elle on reconnaît sa famille, jeunes et vieux et surtout sa mère, qui me paraît de l’âge de la mienne et qui salue la foule rassemblée l’acclamant devant la camarote.

Nous verrons ensuite sur tous les posters autour que la fête, lui est spécialement dédiée et qu’elle a en réalité 100 ans ! C’est Dona Canô Veloso !

Nous allons restés collés nous aussi sous la grande chaleur devant la camarote, appareil photo armé en permanence, prenant en rafale chaque apparition et mouvement de la déesse ! Elle salue la foule de temps en temps, mais surtout prend soin de sa mère, la nourrissant, la désaltérant ! Nous n’en attendions pas autant de notre pèlerinage ! Nous allons tout de même nous nourrir et nous désaltérer nous aussi dans un kilo restaurant proche ! Mais revenons aussitôt après pour découvrir que Caetano est arrivé ! Le frère et la sœur sont là acclamés par leur fans, dont nous faisons partie !

Nous reprenons le bus de retour, fatigués mais heureux de notre expédition ! Si nous étions restés un peu plus peut-être les aurions-nous vus se reproduire sur la scène ! Mais nous avons vu mieux que cela ! Sur scène nous les avons déjà souvent vus, à Porto Alegre, à Paris, Zénith, Olympia, théâtre de la ville, théâtre des Champs Elysées. Mais à Santo Amaro, en famille avec leur vieille mère, si proche de leur peuple, rien de mieux !

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